Histoire de la photographie

Capturer la lumière

Histoire de la photographie

La photographie désigne les procédés et techniques pour reproduire une image sur une surface sensible. Inventée par Louis Daguerre, le plus célèbre des bryards, au début du XIXe siècle, la photographie est devenue incontournable aujourd'hui. Cette exposition vous propose de revenir sur l'invention et le développement de ce médium, pour comprendre son origine et ses évolutions. À travers les collections du musée Adrien Mentienne, partez à la découverte de l'histoire de la photographie, de Daguerre à nos jours.

Aux origines de la photographie

État des recherches et des loisirs autour de l’optique et de la lumière au début du XIXe siècle


Chambre obscure. Jenotte. Estampe. 2e quart du XIXe siècle
Chambre obscure. Jenotte. Estampe. 2e quart du XIXe siècle

Nous voyons bien dans cette illustration le fonctionement de la camera obscura. Les rayons lumineux se projettent sur un miroir au fond de la boîte, qui renvoie l'image sur un autre support.

MAM 2011.0.32

© Musée Adrien Mentienne (collection Daguerre)

La photographie inventée au XIXe siècle ?

Si le premier procédé photographique est celui de Louis Daguerre (1787-1851) en 1839, les origines de la photographie sont à trouver dans les recherches antérieures sur l'optique et la lumière. Nous pouvons pour cela remonter jusqu'à Aristote (384-322 avant J.C.) qui mentionne le principe de la camera obscura.

Appareil essentiel dans la recherche autour de la photographie, la camera obscura (ou chambre noire) est un instrument d'optique dont l'origine remonte au Ve siècle avant notre ère. Elle apparaît ensuite dans les travaux des savants Ibn al-Haytham (965-1040) ou Léonard de Vinci (1452-1519), puis continue d'être utilisée par les artistes et scientifiques jusqu'à la fin du XIXe siècle.

Son principe est simple : dans une boîte hermétique à la lumière on perce un trou (appelé sténopé) qui oblige les rayons lumineux à arriver en ligne droite sur une surface plane au fond de la boîte. Les rayons ne peuvent ainsi se mélanger, ce qui les force à ne restituer qu'un point précis du décor extérieur. On obtient ainsi la projection d'une image inversée du décor extérieur à l'intérieur de la boîte.

L'image produite en deux dimensions est très proche de la vision humaine, si bien que l'appareil est beaucoup utilisé par les dessinateurs et peintres d'extérieurs. Outre cette utilisation, la camera obscura est l'une des outils de base pour les recherches sur l'optique qui ont amené la découverte du procédé photographique.

Chambre claire. 1ère moitié du XIXe siècle
Chambre claire. 1ère moitié du XIXe siècle

La chambre claire ou camera lucida est un autre outil d'optique inventé en 1806. Utilisée dans le dessin, elle permet grâce à un prisme de reproduire avec une grande précision les points clefs d'une image. Le prisme tenu au niveau de l'oeil par la tige permet de voir à la fois l'image à reproduire et le papier, il suffit donc de suivre les contours au crayon.

MAM 2012.0.65

© Musée Adrien Mentienne (collection Daguerre)

La chambre claire. Opticien Chevalier. 1838
La chambre claire. Opticien Chevalier. 1838

Nous pouvons voir dans cette illustration l'utilisation de la chambre claire par un dessinateur. On remarque bien la tige portant le prisme directement sous l'oeil de l'artiste.

© Musée Adrien Mentienne (collection documentaire)

Zograscope. 2nd moitié du XIXe siècle
Zograscope. 2nd moitié du XIXe siècle

Ici un zograscope conservé par le musée Adrien Mentienne. L'impression de relief vient d'un traitement particulier du support, vu au travers d'un miroir incliné à 45° et d'une lentille biconvexe (avec deux surfaces courbées opposées). 

MAM 2012.0.63

© Musée Adrien Mentienne (collection Daguerre)

Depuis quand joue-t-on avec la lumière ?

Avec les recherches autour de l'optique se développent de nombreuses inventions pour jouer avec la lumière, bien avant la photographie. La lanterne magique et le zograscope en sont des exemples.

La lanterne magique, surtout a marqué les mémoires : c'est l'ancêtre du cinéma ! Il s'agit d'un appareil projetant des images fixes ou animés sur un support en reprenant le principe de la boîte noire. Dans une boîte une plaque en verre peinte (à l'envers) est éclairée par derrière ce qui projette son image, généralement sur un mur clair ou un drap tendu. On ne peut pas retracer ses origines avec certitude, mais la lanterne magique est attestée dès le début du XVIIe siècle. Elle est alors un instrument de divertissement avec des projections destinées à faire peur, accompagner une représentation ou partager des connaissances. Entre le XVIIe et le XIXe siècle les images fixes deviennent vite animées, tandis que la qualité optique des lentilles et l'esthétisme des plaques s'améliorent grandement. 

Parmi les variantes de la lanterne magique, le chromatrope connaît un très grand succès tout au long du XIXe siècle. Inventé par Langdon Childe (1781-1874), son procédé reprend celui de la projection de lumière à travers un support peint, ici deux plaques de verres colorés de formes abstraites très vives. On peut y voir deux bandes colorées sur un fond noir, ce dernier devant rehausser la vivacité des tons. Enfin, une manivelle entraîne un mouvement de rotation des deux verres (chacun dans un sens opposé à l'autre), ce qui produit des mélanges de couleurs et des motifs de rosaces hypnotisants. 

Loin de disparaître avec la photographie l'engouement pour les lanternes magiques se prolongent presque sans faiblir sur tout le XIXe siècle... jusqu'à une certaine invention des frères Lumière.

Plaque de verre circulaire pour chromatrope. 2nd moitié du XIXe siècle
Plaque de verre circulaire pour chromatrope. 2nd moitié du XIXe siècle

Ici une plaque décorée de motifs géométriques. Le musée conserve un doublon pour fonctionner sur l'appareil de projection. Les deux plaques tournant en sens inverse pour produire de multiples effets de couleur.

MAM 10.034.2.15

© Musée Adrien Mentienne (collection Daguerre)

Plaque de verre circulaire pour chromatrope. 2nd moitié du XIXe siècle
Plaque de verre circulaire pour chromatrope. 2nd moitié du XIXe siècle

Une autre plaque pour chromatrope datant de la même période. On discerne bien ici la rosace centrale, entourée des motifs géométriques typiques de ces plaques.

MAM 10.034.2.15

© Musée Adrien Mentienne (collection Daguerre)


Comment figer la lumière ?

En cette fin XVIIIe-début XIXe siècle, l'enjeu technique n'est pas de projeter une image mais de la figer sur un support de manière stable et durable. Avant la découverte du daguerréotype en 1839 de nombreuses autres personnes de sciences ont réfléchi à une solution. 

Plusieurs pistes ont été explorées. Johann Heinrich Schulze (1687-1744) par exemple découvre en 1727 que le chlorure d'argent (des sels d'argent traité à l'acide chloridrique) noircit à la lumière. Il crée ainsi le premier véritable élément photosensible. Mais l'image obtenue n'est que latente, c'est-à-dire qu'elle n'est ni stable ni fixée et disparaît après quelques temps. Passer d'une image latente à une image définitive devient l'enjeu principal des recherches suivantes.

Viennent alors d'autres chercheurs tels que Thomas Wedgwood (1771-1805) ou Humphrey Davy (1778-1829) qui poursuivent ses recherches sur la photosensibilité pour parvenir à fixer l'image latente sans obtenir de résultats probants. C'est sur la base de leurs travaux et d'autres, que le premier procédé photographique est découvert.

Portrait de Johann Henirich Schulze. Gabriel Spietzel. Peinture. XVIIIe siècle
Portrait de Johann Henirich Schulze. Gabriel Spietzel. Peinture. XVIIIe siècle

Johann Heinrich Schulze (1687-1744) est un homme de sciences prussien, connu pour sa découverte du chlorure d'argent. La légende veut qu'il aurait fait cette découverte par accident, en laissant exposé au soleil un mélange de craie d'argent et d'acide nitrique. C'est en revenant qu'il a constaté que le mélange avait noirci sous l'action de la lumière.

Source image 

Portrait de John Herschel. Julia Margaret Cameron. Photographie. 1867
Portrait de John Herschel. Julia Margaret Cameron. Photographie. 1867

Autre précurseur peu connu, John Herschel (1792-1871) est un scientifique américain. Considéré comme un des pionniers de la photographie, il découvre l'effet fixeur de l'hyposulfite de soude sur les images photographiques. Ces travaux serviront de base à la découverte de Nicéphore Niépce et Louis Daguerre.

Numéro d'inventaire 2005.100.25

Image issue des collections du Metropolitan Museum of Art 

Point de vue du gras. Photographie sur bitume de Judée. Nicéphore Niépce. 1826-1827
Point de vue du gras. Photographie sur bitume de Judée. Nicéphore Niépce. 1826-1827

Cette photographie est considérée comme la première de l'histoire. On peut y voir une partie du « Gras », la propriété de Nicéphore Niépce à Saint-Loup-de-Varenne. Elle a été réalisée avec du bitume de Judée après une exposition de plusieurs heures. On peut d'ailleurs le deviner en regardant attentivement les ombres : celles-ci trahissent plusieurs positions du soleil.

n° d'inventaire 964:0000:0001

Image issue des collections du Harry Ransom Center 

Niépce-Daguerre, le duo gagnant

Il faut attendre la rencontre entre Nicéphore Niépce (1765-1833) et Jacques-Louis Mandé Daguerre (1787-1851) pour que le moyen de fixer une image latente soit découvert.

Le premier est un chimiste français, connu pour avoir pris la première photographie de l'histoire. En 1824 il met au point le « procédé héliographique », qui permet de reproduire une gravure par l'action de la lumière. On colle d'abord un négatif de la gravure à un papier photo sensibilisé au bitume de Judée (dissous dans de l'huile essentielle de lavande), puis on l'expose au soleil pour ensuite débarrasser le papier du bitume non oxydé afin d'obtenir une copie parfaite. Malheureusement ce procédé ne sera jamais commercialisé.

Louis Daguerre quand à lui est un peintre spécialisé dans les effets spéciaux et jeux de lumière. Il contacte Niépce en 1826 et lui propose une collaboration : Louis Daguerre améliorera la chambre noire et Nicéphore Niépce trouvera le procédé chimique permettant de fixer l'image. Le contrat est signé en 1829, mais il faut attendre 1837 (4 ans après la mort de Nicéphore Niépce) pour que Louis Daguerre mette au point le procédé du daguerréotype. 

Portrait de Louis Daguerre. Jean-Baptiste Sabatier-Blot. Daguerréotype. 1844
Portrait de Louis Daguerre. Jean-Baptiste Sabatier-Blot. Daguerréotype. 1844

Louis Daguerre est déjà connu au moment de sa découverte. Il s'est en effet construit une grande réputation avec ses effets spéciaux de théâtre et ses illusions de dioramas. 

n° d'inventaire 1976.0168.0043

Image issue des collections du George Eastman Museum 

Portrait posthume de Nicéphore Niépce. Léonard François Berger. Peinture à l'huile sur toile. 1854.
Portrait posthume de Nicéphore Niépce. Léonard François Berger. Peinture à l'huile sur toile. 1854.

Chimiste et inventeur reconnu à son époque, Nicéphore Niépce est également célèbre pour avoir créé le premier moteur à combustion interne du monde.

Ce tableau est exposé au musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône. 

Traité définitif entre Louis Daguerre et Nicéphore Niépce. 1829
Traité définitif entre Louis Daguerre et Nicéphore Niépce. 1829

Il s'agit ici du traité d'association qui débouchera sur l'invention du daguerréotype 10 ans plus tard. Les auteurs s'engagent notamment à publier conjointement leurs découvertes et à partager équitablement les retombées économiques qui en découleront.

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica.  


Si l'histoire de Louis Daguerre, le « père de la photographie », vous intéresse, une autre exposition virtuelle vous est proposée juste ici.

Vous pouvez également directement tester vos connaissances sur notre inventeur avec ce quiz.

Le daguerréotype

La véritable découverte de Louis Daguerre est le moyen de fixer l'image sur le support matériel, ce faisant il crée la première manière de prendre une photographie qu'il nomme d'après lui. Homme d'affaire, Louis Daguerre vend son procédé à l'État français en 1839 pour une rente annuelle de 6 000 francs (et une de 4 000 francs pour le fils de son associé Nicéphore Niépce). Le 19 août de la même année, le premier procédé photographique de l'histoire est offert à l'humanité par la France.

Le daguerréotype permet donc de fixer l'image de la camera obscura sur une plaque de cuivre recouverte d'argent. Sa méthode est relativement simple. Tout d'abord une plaque de cuivre est recouverte d'argent puis rendue photosensible par des vapeurs d'iode. Après un temps d'exposition en chambre noire (entre 20 et 30 minutes), la plaque est ensuite suspendue au-dessus de vapeurs de mercure avec une inclinaison de 45° pour rendre visible l'image latente et la stabiliser. Une fois fait, on plonge la plaque dans une solution de sels marins pour fixer l'image. Bien que celle-ci soit encore très fragile, elle ne s'effacera plus de son support.

Rapport de M. Arago sur le daguerréotype. 3 juillet 1839
Rapport de M. Arago sur le daguerréotype. 3 juillet 1839

Ce document est la page de couverture du rapport de François Arago (1786-1853) lu à la chambre des députés les 3 juillet 1839 et à l'Académie des sciences le 19 août de la même année. Scientifique et grand promoteur de la photographique, c'est dans ce texte que François Arago révéle les secrets du procédé daguerréotypique qui sont ainsi rendus publiques.

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica.  

Historique et description des procédés du daguerréotype et du diorama. Louis Daguerre. 1839
Historique et description des procédés du daguerréotype et du diorama. Louis Daguerre. 1839

La même année de l'achat du procédé du daguerréotype par l'État français, Louis Daguerre fait paraître ce manuel décrivant en détail les étapes permettant la capture des images. On retrouve également une description des procédés du diorama, la technique de peinture inventée par Daguerre qui repose sur les illusions d'optique et les jeux de lumière.

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica. 

Le début d'une révolution en plaque

Quelles innovations ont permis à la photographie de se diffuser à toute la société ?

Couple assis se tenant le main. Daguerréotype. 2e quart du XIXe siècle
Couple assis se tenant le main. Daguerréotype. 2e quart du XIXe siècle

Ici le daguerréotype d'un couple se tenant la main. On peut remarquer leur air grave qui s'inscrit dans la culture photographique de l'époque. Ne pas sourire montre que l'on maîtrise ses émotions, norme sociale des premiers clients bourgeois des daguerréotypistes. Les temps de pose assez longs (plusieurs secondes voir minutes) rendent également difficile de tenir le sourire sans bouger.

MAM 2009.0.1

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Un monopole du procédé daguerréotypique ?

Bien que le daguerréotype soit considéré comme le premier procédé photographique de l'histoire, de nombreux autres moyen de fixer les images le suivent très peu de temps après. Certains de ces procédés sont contemporains de Louis Daguerre, comme celui d'Hercules Florences (1804-1879), niçois émigré au Brésil qui présente un moyen de fixation au nitrate d'argent à partir d'une chambre noire à Sao Paulo en octobre 1839. Ce brevet arrivant seulement 3 mois après le daguerréotype, et dû à son éloignement de l'Europe (centre scientifique du monde à cette époque), le procédé d'Hercules Florence passe inaperçu.

Le grand procédé concurrent du daguerréotype reste le calotype. Inventé par le britannique Henri Talbot (1800-1877) et breveté en 1841, le calotype est un procédé photographique reposant sur un support de papier photo sensibilisé aux sels d'argent. Ayant présenté son procédé dès janvier 1839 à la Royal Society de Londres, Talbot revendique la paternité de la photographie (terme qu'il est d'ailleurs le premier à utiliser) mais le calotype ne concurrencera jamais réellement le daguerréotype. Bien que plus économique (un matériel de daguerréotypiste valait 500 francs soit environ 100 jours de travail d'un ouvrier) et reproductible, le rendu du calotype ne convainc pas. Le procédé de Talbot souffre en effet d'un teint sépia, d'une image floue avec beaucoup de masses et de contrastes. Enfin, le brevet déposé par Henri Talbot limite la diffusion et l'appropriation du calotype au contraire du procédé daguerréotypique rendu publique. 

D'autres procédés sont donc développés en même temps que le daguerréotype, mais aucun de connaît sa diffusion et sa popularité. En le rendant publique, l'État français a permis une forte diffusion du daguerréotype en Europe et outre Atlantique, d'autant plus qu'il bénéficie du statut de « premier procédé photographique ». La méthode de Louis Daguerre domine donc les années 1840 avant de progressivement décliner en France à partir des années 1850, et aux États-Unis dans les années 1860-1870.

Autoportrait en noyé. Hippolyte Bayard. 1840
Autoportrait en noyé. Hippolyte Bayard. 1840

Hippolyte Bayard (1801-1887) est un autre inventeur malheureux. Il en effet met au point en 1839 son propre procédé photographique négatif sur papier puis en positif direct quelques mois plus tard, mais son invention souffre du manque de soutien des insitutions politiques et scientifiques. Malgré cela Hippolyte Bayard fait tout pour mettre son procédé en avant. Il organise par exemple la première exposition photographique de l'histoire en juillet 1839, et met en scène son faux suicide dans cette oeuvre.

Source image 

Quels genres de photographies pour le daguerréotype ?

Les premiers sujets de daguerréotypie sont principalement des monuments ou des natures mortes, dû aux temps d'exposition très longs nécessaires (le procédé présenté par Louis Daguerre demande entre 15 et 30 minutes). La photographie est alors pensée comme un moyen d'étude et une forme avancée de dessin, principalement pour documenter le sujet.

Avec l'amélioration du procédé vient la réduction du temps de pose qui ouvre la porte au genre du portrait. Ceux-ci se pratiquent dans des ateliers où la lumière naturelle rentre par des verrières. Les portraits sont encore réservés à une certaine élite, la séance coûtant entre 10 et 20 francs d'or (soit environ une semaine de salaire ouvrier) mais se diffusent rapidement. Ainsi ce sont les portraits qui forment la majorité des daguerréotypes sur toute la période d'utilisation du procédé.

Enfin on retrouve des paysages servant une « photographie documentaire ». L'idée est d'exploiter la précision du daguerréotype pour représenter le réel et documenter la nature ou ses voyages. Cependant le matériel très encombrant et la difficulté à calculer les temps de pose nécessaires rendent difficile les prises de vues extérieures.

La famille au chien blanc. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle
La famille au chien blanc. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle

Les améliorations techniques permettent un temps d'exposition de quelques secondes, ouvrant ainsi la voie au portrait daguerréotypique. Mais ce temps de pose très court n'empêche pas les ratés. Sur cette photo de famille le chien n'a probablement pas assez bien tenu sa pose, et apparaît donc flou.

MAM 2010.1.1

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Le château de Nantois. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle
Le château de Nantois. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle

Nous pouvons ici voir une photographie du château de Nantois dans les Côtes-d'Armor (22). Celle-ci s'inscrit dans un ensemble de prise de vue de monuments, certaines commandées par l'État français pour documenter son patrimoine culturel.

MAM 2011.1.5

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Enfant post-mortem. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle
Enfant post-mortem. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle

La pratique de la photo post-mortem se développe dès le début du daguerréotype aux États-Unis comme en Europe. L'accès aux portraits étant limité, ce cliché du mort, ici un enfant, est une manière répandue de garder une image du défunt. Avec le développement du portrait et des services funèbres au cours de la 2nd moitié du XIXe siècle, cette pratique décline peu à peu.

MAM 2011.1.2

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Nature morte aux oiseaux. Daguerréotype stéréoscopique. 3e quart du XIXe siècle
Nature morte aux oiseaux. Daguerréotype stéréoscopique. 3e quart du XIXe siècle

L'un des premiers genre du daguerréotype ont été les natures mortes et autres sujets d'étude de la nature à des fins artistiques ou scientifiques. Ici une scène de chasse d'un rapace tenant un autre oiseau entre ses serres. La vue double, appelée stéréoscopie, donnait une impression de relief si regardée à travers le bon appareil.

MAM 2013.1.3

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

À VOUS DE JOUER

Reconstituez ce puzzle d'Auguste et Olympe Jactard le plus vite possible !

Le saviez-vous ? Ce sont les grand-parents de Maurice Joron, peintre bryard méconnu auquel nous avons consacré une exposition virtuelle. À retrouver ici.

Une multiplication des procédés

Une fois le daguerréotype rendu publique en 1839, la France est saisie d'une véritable daguerréotypomanie : tout le monde s'arrache cette invention et s'improvise photographe amateur. Cependant les premiers défauts du procédé apparaissent bien vite : être daguerréotypiste coûte cher, les temps d'exposition sont longs (plusieurs dizaine de minute), l'image miroite et ne peut pas être reproduite. Enfin le procédé reste complexe et il faut parfois plusieurs essais infructueux avant de trouver la bonne dose de photosensibilité associée au bon temps de pose pour prendre son sujet.

De nombreux chercheurs entament donc leurs recherches pour améliorer le daguerréotype ou développer un procédé plus performant. En 1841 deux ans à peine après sa présentation, les américains Wolcott et Johnson abaissent le temps de pose à 10 secondes, ouvrant la voie au portrait tandis qu'un daguerréotype du soleil est réalisé en 1855.

Les années 1840 et 1850 sont donc des années de recherches et de diversification du procédé photographique qui aboutissent à de nombreuses méthodes « parallèles » dont le musée conserve des traces. Les enjeux principaux de cette recherche traversent le XIXe siècle, avec l'abaissement du temps de pose, la prise de vue en couleur ou encore la reproductibilité de l'image capturée.

La daguerréotypomanie. Théodore Maurisset. Estampe. 1840
La daguerréotypomanie. Théodore Maurisset. Estampe. 1840

Cette illustration parue dans Estampes relatives à l'Histoire de France montre avec humour la fièvre des premiers clients du daguerréotype. C'est aussi cet engouement qui permet une amélioration si rapide du procédé dans les années qui suivent.

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica  

Portrait de Frédérick Scott Archer
Portrait de Frédérick Scott Archer

Né d'un fils de boucher et calotypiste amateur, Frédéric Scott Archer (1813-1857) invente le procédé au collodion car il est insatisfait des contrastes et de la netteté des autres procédés. Il en fait ensuite don à l'Humanité mais n'obtient pas la reconnaissance attendu et meurt dans la misère.

Image issue des collections de l'université de Stanford. 

Une nouvelle découverte révolutionnaire

En 1851 le monde de la photographie est donc majoritairement dominé par le daguerréotype, mais celui-ci s'apprête à être détrôné par le collodion. Inventé par Frederick Scott Archer (1813-1857), le collodion est un nouveau procédé négatif reposant sur une solution de coton-poudre diluée dans une autre solution d'éther et d'alcool. D'abord « humide », le collodion permet de considérablement réduire les temps de pose avec une surface lisse en verre et sans grain. Il allie également la précision du daguerréotype à la reproductibilité du calotype, révolutionnant la photographie.

Il comporte tout de fois des inconvénients : très inflammable et toxique, le collodion humide nécessite également un travail rapide car la plaque se désensibilise une fois que la solution s'assèche. Un problème résolu dès 1855 en mélangeant le collodion avec l'albumine. 

Deuxième grand procédé photographique, le collodion devient quasiment hégémonique pendant presque 30 ans, des années 1850 aux années 1880.

Père avec sa fille. Ambrotype. 3e quart du XIXe siècle
Père avec sa fille. Ambrotype. 3e quart du XIXe siècle

Breveté en 1854 par James Ambrose Cutting (1814-1867) et Isaac A. Rehn (1815-1883), l'ambrotype est un procédé à base de collodion. Non-reproductible et positif sur fond noir, ce procédé a été concurrent du daguerréotype, grâce à ses coûts moindres et malgré sa qualité médiocre.

PPA.14.1.1

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Portrait d'un jeune homme. Ferrotype. 3e quart du XIXe siècle
Portrait d'un jeune homme. Ferrotype. 3e quart du XIXe siècle

Apparu et supplantant rapidement l'ambrotype àpartir des années 1860, le ferrotype est un procédé positif à base de collodion. Il est mis au point par Adolphe-Martin Alexandre (1824-1896) qui cherche à amélioer l'ambrotype. En utilisant un support en tôle ou en fer blanc, il obtient une plus grande rapidité et une grande baisse des coûts de production.

MAM 10.096.1

© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

La photographie exposée

Une étape importante de l'histoire de la photographie se trouve dans les deux expositions universelles de Londres en 1851, et Paris en 1855. L'idée des expositions universelles naït au milieu du XIXe siècle pour mettre en avant les réalisations industrielles et techniques des pays participants. De fait, les expositions de Paris et Londres ont été des vitrines et des moteurs de l'innovation technique de la photographie. Étudier le rapport de la photographie et des expositions permet également d'observer les conceptions et aspirations projetées sur ce nouveau medium.

Dans le cas de Londres en 1851, c'est le daguerréotype qui est au centre de l'attention dépassant de très loin les procédés papiers tels que le calotype. L'enjeu principal de la photographie est alors la précision, l'exactitude du rendu de l'image, mais la question de la reproductibilité émerge. C'est dans ce contexte qu'un prix est décerné à l'invention du collodion, qui allie précision du daguerréotype et reproductibilité.

À Paris en 1855 se pose également la question du statut de la photographie : pratique artistique ou industrielle ? À cette question les organisateurs poussent vers l'aspect industriel : on met en avant le côté pratique du medium. La photographie doit fournir les études aux fins scientifiques et industrielles de son temps. De même la reproduction à l'échelle industrielle dans un but pratique et pédagogique est clairement l'enjeu de cette exposition, ce qui révèle des antagonismes au sein même des photographes.

Étudier la place de la photographie au sein des expositions universelles permet donc de rendre compte des questions et enjeux qui la traverse. Son statut artistique n'est pas encore clairement défini, de même que son but. Le medium et sa place dans la société sont alors en pleine construction.

Vue interieure du palais de l'Industrie et des Beaux-Arts lors de l'exposition universelle de 1855. Claude-Marie Ferrier. Vue stéréoscopique sur plaque de verre. 1855
Vue interieure du palais de l'Industrie et des Beaux-Arts lors de l'exposition universelle de 1855. Claude-Marie Ferrier. Vue stéréoscopique sur plaque de verre. 1855

Cette stéréoscopie sur plaque de verre est un exemple de la couverture photographique de l'exposition de Paris de 1855. Comme à Londres, ces nombreuses prises de vue de l'évènement contribuent à sa publicité et à l'image moderne et innovante attachée aux expositions.

MAM 2008.4.3

© Musée Adrien Mentienne (collection stéréoscopie)

Boîte de plaques. Franceville. 1er quart du XXe siècle
Boîte de plaques. Franceville. 1er quart du XXe siècle

Cette boîte de plaque d'un format 4 x 4 cm était vendue avec des supports prêts à l'emploi. Le procédé du gélano-bromure, que ces plaques utilisent, est encore utilisé aujourd'hui dans la photographie dîte argentique (en opposition au numérique).

MAM 2008.1.7.2 

© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Vers l'instantanéité

Bien que constamment amélioré, le temps de pose reste un enjeu majeur de la photographie au XIXe siècle. Réduit de plusieurs minutes à quelques secondes, il faut attendre les années 1870 pour parvenir à une prise de photographie instantanée.

Cet exploit est à attribué à Richard Leach Maddox (1816-1902) qui invente le gélatino-bromure en 1871. Afin de trouver un substitut au collodion humide, source de vapeurs toxiques, l'inventeur a l'idée de créer une émulsion de bromure d'argent photosensible et de gélatine. Ce gel peut ensuite être appliquée sur une plaque de verre ou du papier avec l'avantage de conserver leurs propriétés. Le photographe n'est donc plus obligé de préparer ses plaques, mais peut directement les acheter.

L'autre avantage du gélatino-bromure est sont extrême photo sensibilité. De deux à trois secondes, le temps de pose est réduit à 1/25e de seconde par Charles Harper Bennett (1840-1927) qui a l'idée de chauffer l'émulsion pour accroître ses propriétés. L'instantanéité est ensuite atteinte avec Louis Lumière (1864-1948) en 1881. À seulement 17 ans il améliore le procédé pour un temps de pose de 1/60e de seconde. 

Contrôler l'apport en lumière

Pour ne pas sursensibiliser le support photographique, une obstruction du sténopé (c'est-à-dire de l'objectif) est nécessaire pour couper la source de lumière. Au départ fait grâce un simple bouchon installé à la main, les temps de pose toujours plus rapides amènent l'invention des obturateurs. Ces accessoires mécaniques bloquent la lumière de manière infiniment plus rapide. Au départ peu utilisés, ils se généralisent et deviennent indispensables au début du XXe siècle.

Obturateur Guerry. Guerry. 3e quart du XIXe siècle.
Obturateur Guerry. Guerry. 3e quart du XIXe siècle.

Le système présenté ici est dît à volet ou guillotine, ce sont les premiers systèmes inventés en 1849. Une plaque venait tomber devant l'objectif mais, bien que rapide, ce système produisait beaucoup de bruits et de vibrations. Ces défauts ont donc poussés à l'innovation et la recherche d'obturateurs plus fiables.

© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Obturateur à rideau. 4e quart du XIXe siècle
Obturateur à rideau. 4e quart du XIXe siècle

L'obturateur à rideau est inventé en 1860. Son principe est simple : un tissu noir enroulé autour d'un ressort recouvre l'objectif lorsque le cable est actionné en le balayant. D'abord simple puis à double rideau, ce système est très vite devenu le plus rapide, avec des vitesses atteignant le 1/10 000e de seconde au début du XXe siècle.

MAM 2008.1.155

© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Obturateur. 4e quart du XIXe siècle
Obturateur. 4e quart du XIXe siècle

L'obturateur central, ou à iris se développe dans les années 1880. Il couvre l'entièreté de l'objectif et permet une exposition égale et uniforme du support photographique en s'ouvrant par le centre. Encore très populaire dans la première moitié du XXe siècle, ce système est aujourd'hui tombé en désuétude.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

De nouveaux métiers apparaissent

La pratique de la photographie se professionnalise peu à peu dans la 2nd moitié du XIXe siècle. Alors que les premiers daguerréotypistes et calotypistes sont des amateurs, des photographes professionnelles émergent dès les années 1840 pour proposer leurs services de portraitistes. Des ateliers se forment et se multiplient (leur nombre octuple à Paris entre 1840 et1850), ce qui montre le formidable engouement pour la photographie, tandis que des photographes itinérants apparaissent dans les campagnes et les petites villes. Les ateliers sont le plus souvent situés sous les toits, avec de grandes fenêtres et verrières pour laisser entrer la lumière naturelle (l'éclairage artificiel ne se démocratise qu'à partir les années 1890). Au départ onéreux, les innovations techniques permettent vite de baisser les coûts et les prix des portraits qui s'élargissent progressivement aux franges plus modestes de la population.

Le métier même de photographe commence à émerger. Celui-ci est au départ très peu reconnu et déconsidéré, mais a la réputation de faire de l'argent facile. La profession ne tarde cependant pas à s'organiser en union (1859) puis syndicat (1862). Aux côtés des photographes d'autres corps de métiers spécialisés sont nécessaires : chimistes et tireurs pour la préparation et le développement des plaques, peintres et ouvriers pour la confection des décors, ou encore coloristes. Les plus gros ateliers tels ceux du photographe Eugène Disdéri (1819-1889) emploient plusieurs dizaines de personnes. 

Cette professionnalisation et popularité toujours plus fortes de la photographie rencontrent cependant des mécontentements. Certains, comme Baudelaire par exemple, voit dans ce nouveau medium la fin de l'art pictural et de la profession de peintre. On critique également beaucoup les prix demandés pour se faire tirer le portrait, jugés souvent trop cher. 

Les pignoufs. Dessin paru dans le petit journal pour rire. 1862
Les pignoufs. Dessin paru dans le petit journal pour rire. 1862

Cette illustration satirique du XIXe siècle montre bien les critiques faîtes aux photographes. On y voit un client mécontent avec sa réclame : « Cent sous c'te salop'rie là !!! ah ben! j'aimons brav'ment mieux nous r'garder dans not' miroir, j'y voyons not' portrait en nature, et ça n' nous coûte rain... ». 

© Musée Adrien Mentienne (collection documentaire)

Homme barbu et moustachu à la veste claire. Daguerréotype colorisé. 3e quart du XIXe siècle
Homme barbu et moustachu à la veste claire. Daguerréotype colorisé. 3e quart du XIXe siècle

Les daguerréotypes ne pouvant pas restituer les couleurs, la photographie a longtemps eu recours à des coloristes. Artistes indépendants ou employés par le photographe, ils colorisent les photographies pour les rendre plus vivantes et retoucher d'éventuels défauts (boutons, cicatrices, etc.). Ce métier s'est développé dans tous les secteurs usant de la photographie, avant de progressivement disparaître avec l'avènement de la prise de vue en couleur.

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© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Femme au daguerréotype. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle
Femme au daguerréotype. Daguerréotype. 3e quart du XIXe siècle

La confection des décors pouvaient aussi être la tâche de corps de métiers spécialisés. Au départ très sobre, les fonds et accessoires des photographes s'étoffent à mesure que les ateliers s'aggrandissent. Les plus grands embauchent par exemple des peintres pour réaliser des décors en trompe l'oeil dans le fond. L'atelier ayant pris ce daguerréotype ou la cliente devaient donc être plus modestes, le fond n'étant qu'un rideau.

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© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Photosphère. Compagnie française de Photographie. 4e quart du XIXe siècle
Photosphère. Compagnie française de Photographie. 4e quart du XIXe siècle

Certains appareils sont inventés pour des besoins très spécifiques. Le photosphère de Napoléon Conti par exemple, est spécialement conçu en 1888 pour les explorations en milieux tropicaux. Simple, léger et solide, son revêtement entier est en acier pour mieux résister à l'humidité et aux changements de température.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Les différents usages de la photographie au XIXe siècle

Peu après son invention la photographie ne tarde pas à s'étendre à presque tous les aspects de la société. Outre le portrait de particuliers et les premiers usages artistiques du medium, ce sont les intérêts pratiques et divertissants de la photographie qui apparaissent.

Le XIXe siècle voit le développement de la photographie militaire et judiciaire. La police de Paris se dote dès 1872 de son propre service de photographie pour aider à l'identification et la recherche des suspects notamment. La sciences bénéficie également grandement de la photographie, grâce aux nombreux sujets d'études qu'elle permet. Le photographe britannique Eadweard Murbridge (1830-1904) est par exemple le premier à photographier le mouvement d'un cheval. Pour se faire il dispose douze appareils instantanés en ligne, chacun actionnés lorsque le cheval passe devant eux. 

La photographie sert également au divertissement, avec par exemple des projections à la lanterne magique qui connaissent toujours un grand succès. Une invention majeure de ce secteur est la stéréoscopie par Charles Wheatstone (1802-1875). Deux images sont prises avec des angles de vues légèrement décalés pour créer une impression de profondeur et de relief lorsque vue à travers le bon appareil. La stéréoscopie est donc l'ancêtre directe de la 3D, et connaît un immense succès pendant toute la 2nd moitié du XIXe siècle.

Quelques exemples de stéréoscopies

Le déclin de la stéréoscopie ne commence qu'avec l'émergence de la carte postale dans les années 1890. Auparavant la grande époque de la stéréoscopie se définit par une grande diversité thématiques et d'appareils. Nous vous proposons ici d'en découvrir quelques exemples issus des collections du musée Adrien Mentienne. 

Chambre stéréoscopique. 3e quart du XIXe siècle
Chambre stéréoscopique. 3e quart du XIXe siècle

Le modèle de cette chambre est celui adapté pour la prise de vue stéréoscopique. Ici sans objectif, on les plaçait dans les deux trous sur la face droite de l'appareil. La prise de vue se fait ensuite de manière classique, à la différence que deux images, légèrement décallées, sont capturées sur la même plaques.

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© Musée Adrien Mentienne (collection procédés photographiques anciens)

Stéréoscope. 3e quart du XIXe siècle
Stéréoscope. 3e quart du XIXe siècle

Ce stéréoscope est en forme de jumelles, assez petit (11,9 x 19,9 cm) et pratique à transporter. Réservé au visionnage, le fond en verre dépoli que l'on devine permet de créer un contraste avec la carte stéréoscopique visionnée. On peut noter le soin apporté à la laque et aux détails floraux dont il est décoré, cet appareil devait donc être haute gamme. 

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© Musée Adrien Mentienne (collection stéréoscopie)

Stéréoscope. 4e quart du XIXe siècle
Stéréoscope. 4e quart du XIXe siècle

Ici un autre appareil plus récent réservé au visionnement des cartes stéréoscopiques. Sa plus grande taille est pensé pour accueillir plusieurs cartes à la fois. Un système de chaîne permet de changer de carte visionnée grâce aux gros boutons latéraux, tandis que les petits sont réservés à la mise au point.

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© Musée Adrien Mentienne (collection stéréoscopie)

Une question de taille ?

Le format en photographie se définit comme la taille de l'image obtenue par prise de vue. Celui-ci dépend donc grandement du support (plaques, papiers, films ou numériques) ainsi que de l'objectif de l'appareil. La photographie d'hier comme d'aujourd'hui connaît une multiplicité des formats, qui remonte à la naissance même du medium. Jusqu'à l'invention du film à la fin du XIXe siècle, le support des photographies sont principalement les plaques de cuivres ou de verre. La plaque conditionne donc les formats présentés ci-dessous, et continue d'être utilisée jusque dans les années 1950.

Les premiers daguerréotypistes ont déjà le choix entre un format plein de 21,5x16,5 cm ou un format « demie-plaque » de 16,5x10,5 cm. D'autres suivent vite, comme le format 9x12cm ou le grand format 18x24 cm, considéré comme standard pendant tout le siècle.

Certains formats innovants révolutionnent la photographie au cours du XIXe siècle, comme le format « carte de visite ». Inventé en 1855 par le photographe Eugène Disdéri (1819-1889), ce format de 6x10 cm permet une réduction drastique des coûts. Les prix passent de plusieurs dizaines à 1 franc, ce qui permet une popularisation majeure du portrait en permettant à toute une nouvelle franche de la société de s'y essayer. Le succès est aussi fulgurant chez la bourgeoisie, qui adopte la photo-carte comme pratique sociale et mondaine. Une personne haut placée du 2nd Empire peut ainsi distribuer plusieurs centaines de cartes de visites par jour !

Une autre grande innovation est celle du format « carte postal » dans les années 1870 et 1880. Ce format accompagne le développement de l'imprimerie photographique, et donne une nouvelle dimension à la photographie. Principalement objet de portrait, d'art ou d'études, la photographie s'ouvre à une abondance inédite de sujets et se diffuse encore plus dans la société. 

Ainsi dès ses débuts la photographie connaît énormément de format différents. Mais si la taille diverge, le rapport longueur / largeur tend à toujours suivre la même proportion de 3 demis au XIXe siècle, ces formats sont donc aujourd'hui catégorisés comme traditionnels.

Objectif Voigtländer & Sohn. 2e quart du XIXe siècle
Objectif Voigtländer & Sohn. 2e quart du XIXe siècle

Inventé avec le procédé photographique, les objectifs servent de sténopé (entrée de lumière). Équipés de lentilles ils permettent de travailler sur la netteté et le format de l'image à prendre.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Panoram n°1, Kodak. 1er quart du XXe siècle
Panoram n°1, Kodak. 1er quart du XXe siècle

Inventé en 1854 par Thomas Stutton (1819-1875), le panorama permet de prendre une image très large. Monté sur un pivot, l'objectif peut balayer le support photosensible jusqu'à 360°. C'est avec l'invention du film photographique que cette technologie se développe réellement.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Agrandisseur solaire. 4e quart du XIXe siècle
Agrandisseur solaire. 4e quart du XIXe siècle

Un agrandisseur solaire est un appareil servant à augmenter le format d'une image photographique. Pour se faire l'appareil projette l'inverse du négatif sur une plaque ou un papier sensibilisé. Ses lentilles pouvant être réglé pour régler la taille de la projection. Cet appareil, d'un fabriquant inconnu, était conçu pour agrandir les plaques de format 4,5x6 cm.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

La carte postale

Le format de la carte postale (10,5x14,8 cm) commence à se commercialiser dans les années 1870-1880. Sur papier cartonné avec une zone réservée à l'écriture d'adresse, son essor prend véritablement avec les procédés d'impression photomécanique dans les années 1900. On assiste alors à une immense diversité de sujets photographiques : paysages, monuments, villes, personnalités, détournements comiques et politiques, oeuvres d'art.

 Ce nouveau medium a permit d'apporter la photographie dans un sphère plus quotidienne et intime à la grande majorité de la population. Le musée Adrien Mentienne conserve de nombreuses cartes postales représentant Bry-sur-Marne ou ses environs, que nous vous proposons de découvrir à travers cette sélection.  

La mairie de Bry-sur-Marne. Carte postale. Vers 1905
La mairie de Bry-sur-Marne. Carte postale. Vers 1905

Parmi les sujets communs de cartes postales nous pouvons citer les monuments. Fait dans un but commercial, ces cartes mettent en valeur le patrimoine de la commune comme ici en 1905. La mairie de Bry-sur-Marne venait alors de connaître de grands travaux d'agrandissement et de reconstruction (en 1901) dont elle souhaite mettre le résultat en valeur.

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Archives municipales de Bry-sur-Marne

Grande crue de la Marne de janvier 1910. Carte postale. 1910
Grande crue de la Marne de janvier 1910. Carte postale. 1910

Les cartes postales peuvent aussi commémorer un évènement plus ou moins ancien. Sur celle-ci ce que nous pouvons prendre pour lac est en réalité une des rues de Bry-sur-Marne recouverte par les eaux (on peut voir la coiffe d'un lampadaire vers le centre de l'image). En janvier 1910 la Marne sort de son lit et monte à plus de 5 mètre au dessus de son niveau naturel. Profondément marquée par l'évènement, la commune publie des cartes postales pour le commémorer dans les années qui suivent.

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Archives municipales de Bry-sur-Marne

Bry-sur-Marne le chemin de halage et la navigation. Carte postale. 1914
Bry-sur-Marne le chemin de halage et la navigation. Carte postale. 1914

Les images des cartes sont aussi des représentations du quotidien des communes. On retrouve en effet de nombreuses scènes au travail, dans la rue ou encore à l'école. Nous pouvons ici voir le chemin de halage en bord de Marne, avec des personnes navigant sur des barques et un couple de chevaux halant une péniche en arrière-plan. Une scène qui rend bien compte de l'importance de la Marne dans la vie de la commune, pour travailler ou se détendre.

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Archives municipales de Bry-sur-Marne

L'impression photographique

L'imprimerie photographique est l'un des enjeux majeurs de ce nouveau medium dès ses origines. En 1851 déjà la Société d'héliographie est fondée avec comme mission de trouver le moyen de reproduire à un niveau industriel les photographies. Cela intéresse en effet beaucoup, notamment le monde de l'édition et de la presse, si bien que de nombreuses recherches sont entamées en ce sens. Si les daguerréotypes ne sont pas reproductibles, les calotypes ont servi de base pour les premières techniques d'imprimerie photographique. 

Les deux premières sont photomécaniques, c'est-à-dire que les épreuves sont changées en planche à impression pour encre grasse. Il s'agit de l'héliogravure, développée par Nicéphore Niépce et brevetée par Henry Talbot, ainsi que les techniques de lithographies. L'idée est donc de partir d'un négatif pour reproduire l'image sous l'action du soleil ou de la presse. Parmi les premiers entrepreneurs à se lancer dans cette aventure nous pouvons citer Louis-Désiré Blanquart-Évrard (1802-1872) qui ouvre la toute première imprimerie photographique à Lille en 1851. Mais bien que des tirages à plus de 1000 exemplaires en soient sortis, les coûts de l'opération combinés au manque de débouchés conduisent à la fermeture de l'entreprise en 1855. Si cette première initiative peut donc être considérée comme un échec, elle ouvre cependant la voie à de nombreuses autres qui feront de la photographie un produit de consommation courant.

La dernière innovation de taille du XIXe siècle est la similigravure dans les années 1880. Les acteurs principaux de l'invention sont Charles-Guillaume Petit, Georg Meisenbach et Frédéric Ives. Le principe de la similigravure repose sur un système de trame où l'image est formée de points de tailles variables selon la densité voulue de ton. Les points sont ensuite transformés en reliefs sur un support qui sert de plaque d'impression, permettant de lier image photographique et texte sur une même page. Ce procédé révolutionne donc l'impression photographique en permettant son entrée dans la presse, ce qui contribue à rendre le medium de plus en plus accessible. 

Similigravure d'un portrait d'Edward Martin. Date inconnue
Similigravure d'un portrait d'Edward Martin. Date inconnue

Ici un exemple de similigravure, avec la reproduction sur papier d'un portrait. 

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Image issue des collections de l'université Paris Cité. 

Pavillon de l'imprimerie. Hippoliyte Blancart. Photographie. 1889
Pavillon de l'imprimerie. Hippoliyte Blancart. Photographie. 1889

Photographie du pavillion réservé à l'imprimerie lors de l'exposition universelle de 1889 à Paris. L'impression des clichés photographiques est alors un enjeu artistique et industriel majeur.

Document disponible à la lecture sur Gallica

Maintenant que vous avez bien compris le fonctionnement des procédés photographiques, nous vous proposons un petit jeu :

Nous n'avons pas encore vraiment parlé des appareils photographiques en tant que tels. Parviendrez-vous à en retrouver les différents élèments ?

L'invention du film, la photographie pour tous

Comment la photographie est-elle devenue une pratique de masse ?

Kodak Brownie n°3 Model B. Kodak. 1er quart du XXe siècle
Kodak Brownie n°3 Model B. Kodak. 1er quart du XXe siècle

Conçu par Georges Brownell à destination des enfants, le Brownie est l'appareil emblématique du début de l'ère Kodak. Le modèle ici présenté a été produit sur toute la période entre 1907 et 1933. C'est dire son succès !

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Un nouveau support

En 1889 Georges Eastman (1834-1932) commercialise avec sa marque Kodak un nouveau support photographique : le film transparent. Inventé l'année précédente par John Carbutt (1832-1905), le film est composé de nitrate de cellulose, rendu photosensible par l'émulsion de gélatino-bromure. Bien qu'hautement inflammable et instable, les films ont l'avantage d'être plus économique, et surtout plus facile à transporter et stocker que les anciennes plaques. À partir de leur commercialisation, ils deviennent le support standard pour les appareils photos du XXe siècle.

Avec le diffusion de ce nouveau support Georges Eastman lance sa marque Kodak avec une idée simple : toucher de nouveaux publics amateurs. La photographie amateur existe déjà à cette époque, bien qu'elle soit minoritaire, et ne se structure réellement qu'à partir des années 1880. On voit alors se former des sociétés et clubs qui organisent rencontres, initiations et mises à dispositions de matériels photographiques. Kodak a cependant pour ambition d'aller plus loin en proposant des appareils pour des marchés encore peu touchés comme celui des femmes ou des enfants.

L'appareil Kodak emblématique de cette volonté marketing est le Brownie, vendu à seulement 1$ et conçu pour être le plus simple possible d'utilisation. Deux principes essentiels de la marque qui lui permettent d'exercer un quasi-monopole sur le marché de la photographie et du film jusque dans les années 1920. L'influence de Georges Eastman et de sa marque sont alors tellement grandes que le terme « Kodak » est, dans ces années, un synonyme de photographie. 

Folding pocket n°1. Kodak. 1er quart du XXe siècle
Folding pocket n°1. Kodak. 1er quart du XXe siècle

Cet appareil pliant, très populaire à l'époque, est pensé comme très léger et peu encombrant. Georges Eastman n'a pas inventé ce type d'appareil, mais positionne sa marque sur tous les types de marché disponibles

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Kodak Beau Brownie. N°2 (noir et bleu). 2e quart du XXe siècle
Kodak Beau Brownie. N°2 (noir et bleu). 2e quart du XXe siècle

Ce Brownie a été designé dans un style art déco. La reprise de ce style, très en vogue dans l'entre-deux guerres, a permis à Kodak de développer des modèles « tendance » pour toucher un public féminin aisé.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Un état des lieux des appareils photographiques entre le XIXe et XXe siècle

Plus de 70 ans après l'annonce de la découverte de Louis Daguerre, la chambre noire daguerrienne a beaucoup évolué pour aboutir à une grande multiplicité d'appareils. Ceux-ci se distinguent par leurs fabriquants ou leurs usités dans un monde de la photographie très élargie en cette fin de XIXe siècle. Nous vous proposons ici une sélection de quelqu'unes des pièces issues des collections du musée Adrien Mentienne pour illustrer cette diversité.

Le gladiator, E. Mazo, 1er quart du XXe siècle
Le gladiator, E. Mazo, 1er quart du XXe siècle

Cet appareil est ce qu'on appelle un appareil détective. Inventé dans les années 1880, ces appareils légers et discrets permettent des prises de vues très discrètes. Au départs surtout utilisé par les services de polices, un nouveau mouvement artistique s'empare vite de ces appareils dans les années 1890.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Appareil réflexe. Voigtländer. 1er quart du XXe siècle
Appareil réflexe. Voigtländer. 1er quart du XXe siècle

Les appareils réflexe sont les chambres disposant de visée réflexe, qui permet par un jeu de miroir de voir l'image exacte renvoyée sur la plaque dans le viseur. Développée en 1860, la visée réflexe prend réellement son essor dans les années 1880 en équipant de plus en plus d'appareil jusqu'à aujourd'hui.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Photo-album. Appareil espion. 4e quart du XIXe siècle
Photo-album. Appareil espion. 4e quart du XIXe siècle

Les appareils espions sont des appareils camouflés dans des objets anodins, ici un livre. Ils se développent avec les plaques de gélatino-bromure (dans les années 1870) et connaît un grand succès dans les années 1880 qui se prolonge tout au long du XXe siècle. 

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Photo-jumelle, Jules Carpentier, 4e quart du XIXe siècle
Photo-jumelle, Jules Carpentier, 4e quart du XIXe siècle

Les appareils jumelles se développent dans les années 1890 et ne tardent pas à remplacer les apapreils détectives. Ils sont en effet plus maniables, avec des objectifs mieux démontables et de plus grands magasins de plaques. Ces appareils sont vite repris par les journalistes qui en font le premier outil de reportage de l'histoire.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Stéréscope. Maison Jules Richard. 1er quart du XXe siècle
Stéréscope. Maison Jules Richard. 1er quart du XXe siècle

La fin du XIXe siècle voit aussi un regain d'intérêt pour la stéréoscopie avec une grande diversité d'appareil. Des maisons de fabriquants connaissent leurs meilleurs années comme la maison Jules Richard, très réputée et fabriquante de l'appareil présenté ici.

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© Musée Adrien Mentienne (collection stéréoscopie)

Appareil Folding. 1er quart du XXe siècle
Appareil Folding. 1er quart du XXe siècle

Les appareils foldings sont montés sur rails pour permettre de se plier et de déplacer les deux corps (le compartiment de la plaque, et de l'objectif) séparement. Pensé en 1857 mais seuulement commercialisé en 1895, ce type d'appareil est surtout utilisé dans la photographie d'architecture tout particulièrement dans les années 1950.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

 La photographie au féminin ?

Lors de sa présentation en 1839, Louis Daguerre fait du caractère républicain de son invention un argument de vente. Loin des règles et discriminations académiques, le daguerréotype se veut être démocratique et ouvert à tous. Ce faisant une cible assumée de l'inventeur sont les femmes, traditionnellement exclues des cercles académiques et des arts picturaux.

Ainsi quelques daguerréotypistes féminines s'emparent du medium telle que Maria Chambefort, photographe itinérante. Associée à sa mère, les deux femmes vont devenir des figures incontournables de la photographie roannaise. De l'autre côté de la Manche nous pouvons citer Anna Atkins (1799-1871), biologiste et spécialiste du cyanotype (procédé négatif au rendu bleuté). Elle serait la première femme photographe de l'histoire (avec la femme de Henry Talbot Constance) et une pionnière dans la publication de livres illustrés de photographies. De nombreuses femmes sont également employées dans les ateliers du XIXe siècle comme coloristes, peintres ou encore modèles.

Le monde de la photographie inclut donc des femmes dès son origine, mais reste très majoritairement masculin. Une étape est franchie à la fin du XIXe siècle avec la Kodak Girl, égérie de la marque éponyme jusque dans les années 1960. 

Figure marketing de la marque Kodak, cette figure entend faire vendre les appareils aux femmes. La Kodak Girl représente donc une mère de famille qui par la simple pression d'un bouton immortalise les souvenirs de famille. C'est un style de vie et une nouvelle place au sein de la famille pour les femmes que promeut la publicité de Kodak. En parallèle la marque développe des appareils pensés comme des accessoires de mode. Là aussi la stratégie publicitaire est au centre de ce projet, avec des campagnes publiées dans les plus grands magazines féminins. Le marché féminin devient ainsi un enjeu commercial fort pour les fabricants.

C'est donc dans l'entre-deux guerres que la place des femmes dans le milieu de la photographie s'affirme et se développe franchement. Et si elles sont au départ pensé comme une clientèle essentiellement amateur, les femmes vont de plus en plus s'affirmer comme créatrice d'images photographiques artistiques et professionnelles dans les décennies suivantes.  

Portrait de Maria Chambefort. Vers 1870
Portrait de Maria Chambefort. Vers 1870

Maria Chambefort (1840 - 1893) est l'une des premières daguerréotypistes de renom. Formée à Lyon par son oncle portraitiste François Perraud, elle lance ensuite sa propre activité de portraitiste itinérante dans la région. Elle ne tarde pas à y acquérir une très bonne réputation lui permettant d'ouvrir son propre atelier à Roanne à partir de 1859. Photographe professionnelle, elle effectue portrait, clichés de rues, de bâtiments ou encore de photographies post-mortem.

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Lee Miller correspondante de guerre. 1943
Lee Miller correspondante de guerre. 1943

Élizabeth Miller (1907 - 1977) découvre la photographie par le mannequinat avant d'elle même devenir photographe professionnelle en 1930. Grande artiste surréaliste, elle s'engage comme correspondante de guerre pour Vogue en 1940. Ses photographies de la 2nd Guerre Mondiale font partie des plus iconiques du conflit. Elle couvre le Blitz, le débarquement de Normandie, la découverte des camps, et se photographie même dans la baignoire d'Adolphe Hitler à Munich.

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Autoportrait. Vivian Maier. 1954
Autoportrait. Vivian Maier. 1954

Vivian Maier (1926 - 2009) est une nourrice américaine passionnée de photographie. Toujours équipée de son Rolleiflex, elle prend plus de 150 000 images au cours de sa carrière dans les villes de New-York, Los Angeles et Chicago. Ce n'est qu'après sa mort qu'on découvre les milliers de clichés que la photographe n'a jamais cherché à publier ou même développer. Elle est aujourd'hui reconnue comme l'une des maîtres des photographes de rue et sa singulière histoire l'a érigée en mythe de la photographie moderne.

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Leica IIIc. Leica. Appareil photo. Début des années 1940
Leica IIIc. Leica. Appareil photo. Début des années 1940

Cette appareil Leica fait partie des derniers modèles de la série. Dit époque de guerre, il est le premier à bénéficier d'un boîtier de construction industrielle.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Le Leica

Le Leica est un appareil photographique développé par la maison Leitz et Oskar Barnak (1879-1936). Commercialisé en 1925, le Leica I (premier modèle d'une longue série) connaît tout de suite un immense succès. Celui-ci vient en effet de son contraste avec les autres appareils photos de l'époque. Plus léger et facile d'utilisation, la marque est innovante notamment grâce à la capsule protégeant le film jusqu'à son développement, ce qui réduit grandement les risques de pertes et de détériorations des images. La force de la marque vient aussi des nombreux accessoires facilement montables ou démontables : objectifs, boîtiers à différentes focales, viseur ou encore télémètre (instrument de mesure de la distance). Mais le Leica marque surtout par son choix de format novateur : le 35 mm.

Utilisant le film souple développé par John Carbutt, ce format n'est alors utilisé que dans le cinéma. Version améliorée du 70 mm initial, le 35 mm devient standard dans le cinéma au tout début du XXe siècle. Son introduction dans le monde de la photographie se fait d'abord par Etienne Molier (1878-1962) en 1909, mais c'est le Leica qui popularise le format, et l'appareil devient vite complétement associé au 35 mm.

Le Leica est enfin un appareil photographique largement adopté par le monde professionnel. Si de nombreux artistes le choissisent, ce sont les photo reporters qui font rentrer l'appareil dans l'histoire. Utilisé jusque dans la fin des années 60, le Leica participe au développement de la presse et du reportage photographique, en capturant les grands moments historiques du milieu du XXe siècle.

Drapeau rouge sur le Reichstag. Yevgeny Khaldei. Photographie. 2 mai 1945
Drapeau rouge sur le Reichstag. Yevgeny Khaldei. Photographie. 2 mai 1945

L'une des plus célébres photographies de la seconde guerre mondiale a été prise par un appareil Leica. Le photographe, Yevgeny Khaldei, est un reporter russe qui a accompagné l'Armée rouge durant toute la guerre, jusqu'à capturer cette image iconique à Berlin en 1945.

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Quand la photographie a bonne presse

Une du 25 juillet 1895 du journal l'Illustration
Une du 25 juillet 1895 du journal l'Illustration

Cette image d'une garde barrière est la première photographie intégrée à une page de presse sans intervention d'un dessinateur.

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica. 

L'invention de la photographie a profondément marqué l'histoire de la presse. Avec ce nouveau moyen iconographique, les journaux se couvrent d'illustrations et évoluent vers les médias modernes que nous connaissons aujourd'hui.

La première photographie imprimée dans un feuillet de journal apparaît dans L'illustration du 25 juillet 1891. Pour être plus précis, il s'agit d'une gravure obtenue à partir d'un négatif d'un collodion humide reporté sur un planche de bois, le tout avec un fond dessiné. Cette illustration représente parfaitement les débuts de la photographie dans la presse. La qualité des clichés ainsi que les techniques photomécaniques encore primitives ne permettent pas de directement intégrer une photographie dans le journal, le recours à la gravure ou au dessin est donc nécessaire. Entre le début des années 1840 et 1895, cette cohabitation est la norme. Des dessins ou gravures réalisés (ou non) d'après des photographies illustrent donc les journaux.

Il faut attendre 1895 pour que les clichés deviennent une iconographie imprimable grâce au procédé de la similigravure. Cette date amorce le déclin de la gravure et du dessin de presse, qui se maintiennent jusque dans les années 1920 avant de presque disparaître. Les avantages de la photographie sont en effet multiples. Ils permettent tout d'abord une plus grande rapidité d'impression, en supprimant la chronophage réalisation de la gravure ou du dessin. Les clichés ont également une réputation d'objectivité et de réalisme inédit : la photographie rend le réel tel qu'il apparaît. Certains objectent en mettant en avant le nécessaire choix de sujet du photographie, l'absence de couleurs où les mises en scène parfois nécessaire des sujets. Mais ces critiques n'empêchent pas les clichés de s'imposer comme l'iconographie indispensable de la presse.

Parce que c'est une révolution en profondeur du monde la presse qui est opérée. Avec la photographie on privilégie une information fraîche et de première main qui modifie la forme des articles. La qualité littéraire des auteurs devient secondaire au profit d'un style brut où l'information est délivrée de manière efficace. On voit également apparaître une forme de sensationnalisme car la photographie permet la représentation fidèle d'images chocs. Le reporter est naît.  

Gaumont reporter. Gaumont. 1er quart du XXe siècle
Gaumont reporter. Gaumont. 1er quart du XXe siècle

Certains appareils ont été spécialement conçus pour la photographie de presse. C'est le cas du Gaumont reporter. Appareil à plaque plus gros et plus lourd que le Rolleiflex ou le Leica, il avait l'avantage de produire des négatifs immédiatement tirables pour la presse.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Rolleiflex Grey Baby. Franke & Heideke. 3e quart du XXe siècle
Rolleiflex Grey Baby. Franke & Heideke. 3e quart du XXe siècle

Autre appareils prisés des reporters, les Rolleiflex se développent à partir de 1929 et sont produits jusque dans les années 1990. Très maniables et équipés de technologies innovantes, ils s'imposent comme des concurrents du Leica sur le marché de la presse.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Pierre Angénieux faisant une démonstration
Pierre Angénieux faisant une démonstration

Pierre Angénieux (1907 - 1998) est un ingénieur français connu pour avoir inventé le zoom en 1954. Ayant fait ses premières armes dans le cinéma, c'est à partir de cette expérience qu'il révolutionne le monde des objectifs. Ses inventions lui vaudront un Oscar en 1964, et l'honneur d'équiper les appareils photos de la mission Apollo XI en 1969.

Image issue des archives de Thalès Angénieux.

La photographie d'après-guerre

Dans les deux décennies qui suivent la fin de la 2nd Guerre Mondiale, le monde de la photographie connaît de nombreuses innovations et évolutions. Les appareils continuent de se moderniser et de s'ouvrir au grand public, tandis que nouveaux pôles de constructeurs émergent.

Parmi les grande inventions des années 1940 et 1950, nous pouvons citer le premier appareil photographique entièrement modulable par la marque suédoise Hasselbald. Le français Pierre Angénieux (1907-1998) invente le zoom tandis que les moteurs électriques apparaissent progressivement. De nouvelles marques de fabricants prennent également leur essor, particulièrement au Japon où les usines militaires sont reconverties en usines civiles.

La période d'après-guerre marque donc un temps de quasi-démocratisation de la photographie. Le public a accès à une variété jusqu'alors inégalée d'appareils et d'accessoires toujours plus compacts et bon marché. Les laboratoires professionnels restent indispensables pour le développement des photographies, mais bénéficient également d'innovations. Le développement est moins coûteux, plus rapide et l'ajout de couleurs se démocratise pleinement à cette période. 

Petie. Walter Kunik. années 1950 et 1960
Petie. Walter Kunik. années 1950 et 1960

Tout comme le Japon, les producteurs d'appareils photos allemands d'après-guerre ont profité de la réorientation industrielle du pays. À l'image de ce modèle Petie par Walter Kunik qui est construit dans les années 1950 et 1960. Appareil miniature et peu couteux, il est alors parfaitement adapté au marché allemand de son époque, encore marqué par le conflit mondial.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Torel. Anasuma and Co. 3e quart du XXe siècle
Torel. Anasuma and Co. 3e quart du XXe siècle

Parmi les appareils photos japonais de l'après guerre, le musée Adrien Mentienne conserve ce Torel. Petit appareil curieux, il a connu un certain succès dans les années 1980 grâce à sa très petite taille et sa personnalisation à la commande très poussée.

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© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Zorki 4. Usines KMZ. 3e quart du XXe siècle
Zorki 4. Usines KMZ. 3e quart du XXe siècle

Le Zorki modèle 4 est un appareil russe pour la première fois manufacturé dans les années 1950. Entièrement manuel, il est le premier appareil soviétique à s'exporter à l'Ouest où il connaît un succès notable.

MAM 2008.1.145

© Musée Adrien Mentienne (appareils photographiques)

Photographier la vie en rose

La photographie en couleur ne devient vraiment la norme que dans les années 1950. Si des procédés existent bien avant cette période, leur complexité ainsi que leur coût rendent difficile leur diffusion.

Les premiers procédés photographiques, tels que le calotype ou le daguerréotype, ne permettent pas de rendre la couleur. Aussi de nombreuses recherches sont entamées dès le début de la photographie pour y parvenir. L'un des pionniers de ses recherches sont Louis Ducos du Hauron (1837-1920) et Charles Cros (1842-1888).

Inventeurs français, ils débutent leurs travaux dans les années 1860 qui débouchent sur l'invention de la trichromie. Bien que les deux hommes partagent la paternité de l'invention, le brevet est déposé par Louis Ducos en 1874. Le procédé repose sur la synthèse soustractive des couleurs : l'image est projetée à travers trois filtres (vert, bleu et rouge) sur trois plaques différentes. En superposant ensuite les plaques pour y faire passer de la lumière, on parvient à projeter une image colorée. C'est le début de la photographie en couleur.

Le procédé est par la suite repris et amélioré par les frères Lumière Auguste (1862-1954) et Louis (1864-1948). Il brevète en 1895 l'ALL Chroma avec des plaques recouvertes de gel colorisé en cyan, magenta et jaune. Cependant les temps de pose sont longs, et le rendu ne satisfait pas les inventeurs qui poursuivent leurs recherches avec l'Autochrome. Commercialisé en 1903, ce procédé est utilisé jusque dans les années 1930. Les plaques sont recouvertes d'une fine couche de fécules de pomme de terre colorées en rouge orangé, bleu et vert. 

Ce même principe sera repris avec des émulsions de cinéma adaptées à la photographie dans les années 1950. Ce n'est véritablement qu'à ce moment que la couleur s'impose dans la photographie professionnelle et amateur.

Ruban de tartan. Thomas Sutton. Méthode des trois couleurs primaires. 1861
Ruban de tartan. Thomas Sutton. Méthode des trois couleurs primaires. 1861

Cette image d'un tartan est la première photographie en couleur de l'histoire. Thomas Sutton (1819-1875) a utilisé la méthode des couleurs primaires pour créer cette image. Pour cela il a pris trois photographies noires et blancs à travers des filtres de couleur rouge, bleu et vert. Une fois projetait ensemble, ces photographies rendent les couleurs originales.

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Auguste et Louis Lumière. Photographie. 1895
Auguste et Louis Lumière. Photographie. 1895

Auguste (1862-1954) et Louis (1864-1948) sont des inventeurs français de renom. Surtout connus comme les pères du cinema, les deux frères ont aussi développés le procédé photographique en couleur du début du XXe siècle avec l'autochrome. Louis Lumière (le cadet) considérera d'ailleurs ce procédé comme la plus belle invention de sa carrière.

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Femme en noir aux cheveux gris cousant. Autochrome. Georges Maroniez. Fin du XIXe siècle
Femme en noir aux cheveux gris cousant. Autochrome. Georges Maroniez. Fin du XIXe siècle

Nous avons ici l'exemple d'un autochrome par le photographe et peintre Georges Maroniez (1865-1933). Nous pouvons bien apprécier la vivacité des couleurs restituées, même si la plaque est abîmée en bas. 

Ce document est disponible à la lecture sur Gallica 

CCD d'une webcam. 2004
CCD d'une webcam. 2004

Initialement conçu pour les téléscopes, le CCD photographie la lune en 1974 et équipe le téléscope Hubble en 1990.

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Le numérique, ou la photographie du futur

Au début des années le marché de la photographie est en perte de vitesse, les cinq géants du milieu (Kodak, Fuji, Canon, Nikon et Minolta) se réunissent donc. Ils essayent de redynamiser le marché par l'innovation : l'électronique se standardise et on invente le format APS (Advanced Photo System) de 24 mm permettant l'introduction de métadonnées sur la pellicule (date, exposition, format, etc.). Mais sans grand succès.

C'est du numérique qu'arrive le renouveau dont la photographie a besoin. Un premier pas est fait en 1973 avec le développement du capteur CCD (Charged Coupled Devise), qui permet de traduire des points lumineux en données électriques. D'abord utilisé par les télescopes, l'invention du CDD est récompensée par le prix Nobel de physique en 2009. Il faut ensuite attendre l'ingénieur de Kodak Steven J. Sasson qui combine le capteur avec d'autres technologies pour produire la première image numérique en 1975. 

La photographie numérique se développe alors très vite. 

En 1982 est commercialisé le premier appareil disposant de cette technologie. Fonctionnant avec 3000 capteurs CCD, l'image obtenue doit être retranscrite par ordinateur. Le dycam Model 1 de 1990 s'affranchit de cet intermédiaire en devenant le premier appareil entièrement numérique. L'année suivant Kodak intègre un écran à ses appareils pour visualiser les photos prises, puis un support de stockage supportant une centaine d'images en haute résolution. Les progrès sont rapides et le format gagnent en popularité, mais ne devient pas standard dans les années 1990.

La technologie est en effet en plein développement : la qualité est relativement médiocre et les appareils sont chers. Ce n'est donc que dans la décennie suivante que le numérique s'impose vraiment comme le standard de la photographie. L'argentique, dont les prix sont de moins en moins compétitifs, ne peut pas rivaliser avec ce nouveau format. On assiste alors à son déclin, jusqu'à sa quasi-disparition de la photographie amateur, 160 ans après son invention par Louis Daguerre.

Croquis du premier appareil numérique. Steven J. Sasson. 1975
Croquis du premier appareil numérique. Steven J. Sasson. 1975

C'est à partir de ce croquis que Steven J. Sasson imagine le premier appareil numérique. En combinant un capteur CCD et un convertisseur d'image analogique-numérique il parvient à prendre la toute première photographie numérique. Il s'agit d'un portrait en noir et blanc de 100x100 pixels.

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Dycam model 1. Logytech. 1991
Dycam model 1. Logytech. 1991

Le dycam model 1 est le tout premier appareil entièrement numérique, commercialisé presque 10 ans après le premier cliché numérique. La résolution était cependant très basse, et avec un mémoire limitée qui pouvait se vider en cas de manque de batteries. Beaucoup d'autres innovations sont donc encore nécessaires avant d'arriver aux appareils numériquess modernes.

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K800i et son capteur 3,2 mégapixels. Sony Ericsonn. 2006
K800i et son capteur 3,2 mégapixels. Sony Ericsonn. 2006

L'une des conséquences directs de la photographie numérique est l'arrivée des appareils sur téléphone. Appelés photophone ou camphone, ils apparaissent en 1997 et sont aujourd'hui les appareils photo les plus vendus au monde. L'appareil présenté en illustration est l'un des premiers appareils à proposer un capteur de 3,2 mégapixel, ce qui annonce la concurrence des photophones avec les appareils photos traditionnels.

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À vous de jouer !

Merci beaucoup d'avoir suivi cette exposition autour de l'histoire de la photographie.

Voyons maintenant ce que vous en avez retenu !

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